Un printemps à Tchernobyl (Lepage)
♦ Acclamé par toute l'équipe ♦
♦ 3ème place du Prix K.BD ♦
Un printemps à Tchernobyl, Emmanuel Lepage
Mo' : « Superbe album à tous points de vue. »
Yvan : « La maîtrise graphique d’Emmanuel Lepage est à nouveau impressionnante. »
Nico : « Un documentaire troublant. »
Lunch : « L'un des meilleurs [albums] de l'année 2012. »
Badelel : « En prendre plein les mirettes et plein l'âme ! »
Oliv': « Lisez cet album, il vous surprendra et plus d'une fois ! »
David: « Un album fort à la fois terrifiant et riche d’enseignement. »
Livr0ns-n0us : « Un ouvrage dont il est impossible de ressortir indemne. »
Legof : « Une pure merveille. »
2008 : Emmanuel Lepage, accompagné de l'illustrateur Gildas Chassebœuf, prend le train pour se rendre à Tchernobyl. Ils rejoignent là-bas le photographe-poète Pascal Rueff et la musicienne Morgan Touzé, stationnés dans une ancienne ferme vaguement retapée à Volodarka, bourgade d'environ 300 habitants située à une vingtaine de kilomètres du lieu de la catastrophe. Pour eux, ce voyage n'est pas un coup d'essai ; pour Emmanuel Lepage en revanche, Tchernobyl a tout d'un saut dans l'inconnu. Tous ont répondu présent à l'appel de Dominique Legeard, président des Dessin'Acteurs, association militante qui regroupe des artistes qui souhaitent s'impliquer dans des actions « concrètes ».
« Nous croyons que l'artiste est à même de capter l'étrangeté de vivre là-bas et d'en témoigner. »
Mo' pensait « le sujet délicat, lourd, macabre. » Les premières pages ne sont en effet guère riantes... Dans le train qui l'emporte vers la « zone interdite », Emmanuel Lepage est plongé dans La supplication de Svetlana Alexievitch, témoignage insoutenable des effets de la contamination après l'explosion de la centrale nucléaire, le 26 avril 1986. Fusain épais, lavis sépias et noirs, traits goudronneux : cette mise en bouche percutante qui a « littéralement scotché » Lunch semble poser d'emblée l'ambiance de l'album, unanimement qualifiée d'oppressante et d'angoissante. Mais à quoi d'autre s'attendre lorsque l'on parle de Tchernobyl ? La plus grande catastrophe nucléaire de l'histoire est encore bien présente dans tous les esprits. Comme le souligne Oliv', cet album « touche à l'intime. Le sien, le nôtre. […] Le nôtre, parce que c'est encore dans nos souvenirs. » 22 ans après, les chiffres sont encore vagues et le déroulement des évènements prête toujours à controverse. Et la vie là-bas, c'est comment ? « Qu'est-ce qui peut pousser un auteur BD [...] à toucher du doigt les existences détruites et la nature ravagée ? » me suis-je moi-même demandé, en écho aux propres interrogations de l'auteur.
Pour Emmanuel Lepage, cette expédition prend très vite un tournant extrêmement personnel. Comme le font remarquer David et Legof, Un printemps à Tchernobyl n'est pas seulement un documentaire mais aussi « une sorte de voyage initiatique », une « quête spirituelle, », où l'auteur confie sans retenue l'inquiétude de ses proches à l'idée de ce voyage et ses propres angoisses. Atteint pendant 6 mois de la crampe de l'écrivain qui l'empêche de dessiner, il s'interroge sur son utilité à Tchernobyl s'il ne peut raconter. Et, malgré son handicap, s'y rend tout de même.
Ce qu'il y trouvera, il ne s'y attendait pas. Certes, la zone abandonnée n'est pas reluisante. Certes, ces villes fantômes, ces hangars désertés et ces bureaux encore plein de papiers sont une vision terrible, étouffante. Nico est encore hanté par « le "tic tic" continu des dosimètres qui mesurent le taux de radioactivité » et qui limite, tant spatialement que temporellement les excursions dans la « zone interdite ». Mais très vite, la tension palpable d'Emmanuel Lepage laisse place à quelque chose qui « le surprend et le déstabilise, voire le culpabilise » (Livr0ns-n0us) : la vie. Tout n'est pas mort à Tchernobyl ! L'auteur y découvre une communauté comme une autre, peut-être plus consciente encore de l'urgence de vivre. Ses doigts se délient et reprennent leur danse sur le papier. Les pages sombres et glauques font place aux sourires et aux couleurs éclatantes de la nature qui a depuis longtemps repris ses droits. Comme le fait remarquer Mo', « il est avant tout question de rencontres, de soirées passées entre amis, d’amitiés qui se lient et de "visites de bon voisinage" ».
« ... Mais regarde Gildas ! On nous envoie ici pour représenter le désastre et on va revenir avec des dessins de paysages, d'animaux, d'enfants ! Ce n'est pas ce qu'on attend d'un livre qui sera diffusé par des gens qui se battent contre le nucléaire !
- Et l'honnêteté alors ? C'est quand même de dessiner ce que nous voyons, pas ce qu'on n'attend de nous ! »
Lunch relève « des couleurs inattendues comme ce bleu sur les troncs d'arbres... des couleurs qui [lui] ont par moments rappelé les photographies de Rory Carnegie », tandis que pour Yvan, « l’association des mots « printemps » et « Tchernobyl » sur la couverture de cet album, prend subitement tout son sens ». Graphiquement, Un printemps à Tchernobyl remporte tous les suffrages. « Quelques pleines pages à couper le souffle » (Yvan), des « illustrations [...] si détaillées qu’on pourrait facilement conclure qu’il s’agit d’un travail de retouche de photos » (Mo'), un « travail [...] bluffant comme d’habitude avec cet auteur » (Nico), une « une méga-claque visuelle » (Badelel)... Bref, vous l'aurez compris, l'équipe au complet a été séduite et impressionnée par la maîtrise d'Emmanuel Lepage, au sommet de son art, contraint ici en plus de faire face aux défis techniques du dessin en zone contaminée. Fusain, crayon, aquarelle ou sanguine n'en sont que plus époustouflants.
Même si Lunch n'a « pas été emporté de la même façon tout du long de l'album », tout le monde s'accorde à souligner la qualité exceptionnelle de cet ouvrage « profond, fort, terrifiant, humain et citoyen. Essentiel tout simplement. » (David). On ne peut que regretter qu'il n'ait pas été nommé à Angoulême... On vous encourage en tout cas grandement à vous offrir (ou à offrir !) cet album documentaire, bien plus qu'un simple carnet de voyage, d'autant que comme le rappelle Nico, une grande partie des recettes est reversée à l’association Les enfants de Tchernobyl.
« J’allais découvrir des terres interdites où rôde la mort […] et c'est la vie qui m'a surpris. »